L’agriculture existe depuis plus de 10'000 ans et reste la source principale d’alimentation des foyers suisses. Produits laitiers, légumes et viandes sont au menu de la plupart des repas quotidiens en Suisse. Cependant, il semblerait que beaucoup continuent d’ignorer les difficultés que traversent nos agriculteurs depuis quelques années déjà.
Les produits issus de leurs cultures sont rachetés à des sommes de plus en plus dérisoires pour permettre un profit maximum à la revente, diminuant grandement le rendement de leurs exploitations et les forçant, parfois, à mettre la clé sous la porte. Leur métier, un des plus utiles et nécessaires qui soit pour notre survie, n’est pas toujours suffisamment valorisé et victime, lui aussi, d’une certaine méconnaissance.
Pour tenter de mieux connaître leur travail, leurs préoccupations mais aussi l’amour qu’ils portent à leur profession, j’ai rencontré 2 jeunes éleveurs établis à Liddes, Messieurs Corentin Fiora et Samuel Pierroz. Ils possèdent un élevage de près de 450 moutons et chèvres ainsi qu’une cinquantaine de vaches Highland et d’Hérens. Leur passion pour leur métier saute immédiatement aux yeux, ils en parlent avec grand enthousiasme, se voulant à la fois conservateurs et innovateurs. Leur exploitation, c’est une histoire de famille, héritée par Samuel de son père et qu’il mène aujourd’hui seul, assisté par Corentin. Gérer une « entreprise » aussi importante, avec le contexte économique actuel, cela demande énormément de travail, de volonté mais aussi de sacrifices. Les jours de congé sont quasi inexistants et les tâches très nombreuses durant les 365 jours de l’année. Ces jeunes éleveurs sont pleinement conscients qu’il est quasiment impossible, au jour d’aujourd’hui, de miser sur une seule source de revenu tel le lait pour maintenir à flot l’entreprise. Ils se veulent donc polyvalents, produisant des fromages de chèvres et de la viande d’agneau ou de bœuf, directement vendus aux consommateurs sans intermédiaire. Ils souhaitent d’ailleurs agrandir et, peut-être à l’avenir, installer un petit magasin où ils pourraient vendre leurs produits directement.
Leur amour pour leurs bêtes est, lui aussi, bien visible. Ils leur donnent tout leur temps, soignant les malades, s’occupant des mises bas, des cabris trop faibles, jusqu’au pied de leur lit, de jour comme de nuit. Ils leur ont offert des installations leur permettant de sortir à l’année, spacieuses et respectant scrupuleusement toutes les normes en vigueur. Durant toute l’année, ils les accompagnent partout, même jusqu’à l’abattoir où ils restent à moins de 2m d’elles, sans jamais cesser de leur parler pour leur éviter tout stress. Le troupeau connaît désormais la voix de Corentin et lui obéit sans l’aide de chien de berger. Il ne conserve donc celui-ci que comme accompagnateur, évitant de lui laisser faire tout le travail comme cela est souvent le cas dans la majorité des élevages. Leur bétail passe tout l’été sur les pâturages, en compagnie d’un berger, constamment présent. Il dort seul dans une cabane sur place, de juin à octobre et s’occupe de surveiller les troupeaux, de les migrer sur les zones favorables en terme de qualité de végétation ainsi qu’à déplacer les enclos où les bêtes sont installées la nuit, pour éviter les prédations. Samuel et Corentin, grâce à l’utilisation des divers moyens de protection mis à leur disposition, n’ont perdu que 5 bêtes. Aucune preuve n’ayant pu être apportée, ils n’ont pas souhaité donner suite. Malgré cet épisode, ils tiennent à être clairs : ils ne sont pas contre le loup, ils désireraient vraiment qu’il trouve sa place dans la nature, comme toute autre espèce. Mais, de leur point de vue, les pertes engendrées par sa présence sont difficiles à digérer pour les éleveurs et les moyens existants pas suffisamment efficaces. Une problématique à laquelle ils n’ont pas de solution à apporter, bien qu’ils le regrettent.